L'utilité du détective privé dans le cadre des dérives sectaires
Loi du 9 décembre 1905 de séparation des Églises et de l’État, prévoyant que le culte soit organisé par le régime juridique des associations cultuelles, lesquelles sont des associations à but non lucratif selon la loi de 1901 soumises à un régime spécifique.
Définitions doctrinales
1. François Pignier, ancien président de la chambre à la CA de Paris et vice-président du CCMM (Centre contre les manipulations mentales) : « Association de personnes soumises à un chef incontrôlé, le gourou, qui s’emploie à inculquer une idéologie indiscutable au moyen de techniques manipulatoires dans un but de pouvoir ou de lucre. »
Nous mettons ici en évidence 5 éléments :
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Une association de personnes physiques ;
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Un chef absolutiste ;
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Une idéologie péremptoire ;
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Des manipulations spécifiques physiques et mentales ;
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Une finalité de pouvoir ou d’enrichissement excessif.
2. Jean-Pierre Jougla, coresponsable du DU Emprise Sectaire, processus de vulnérabilité et enjeux éthiques auprès de la faculté de médecine et de l’université Paris V.
Cette seconde définition découle de la notion d’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse, dont le délit est réprimé par l’article 223-15-2 du Code Pénal (issu de la loi du 12 juin 2001, dite « loi About-Picard ») : « mouvement portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, qui abuse de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique, créé, maintenu ou exploité, résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement pour conduire à un acte ou une abstention gravement préjudiciable »
Les réseaux de lutte "anti-sectes"
MIVILUDES
(Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires)
Les missions de la MIVILUDES :
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Observer et analyser le phénomène sectaire ;
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Coordonner l'action préventive et répressive des pouvoirs publics à l'encontre des dérives sectaires ;
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Informer le public sur les risques et les dangers auxquels il est exposé.
CCMM - Centre Roger Ikor
(Centre Contre les Manipulations Mentales)
Les missions du CCMM :
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Informer sur le phénomène sectaire ;
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Effectue de la prévention ;
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Accompagne les victimes des mouvements sectaires et leurs proches ;
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Cherche à faire progresser le débat et à peser sur la décision publique.
UNADFI
(Union Nationale des Associations de Défense des Familles et de l'Individu Victimes de Sectes)
Les missions de l'UNADFI :
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Prévenir les agissements des groupes, mouvements et organisations à caractère sectaires ;
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Accompagner et défendre les familles et les victimes ;
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Etudier les doctrines et pratiques de ces mouvements sectaires ;
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Informer et documenter le public.
De « secte » à « dérive sectaire »
Le mot « secte » est utilisé dans le langage courant et aucun texte de loi interdit l’appartenance à l’une d’entre elles.
La MIVILUDES a alors orienté son action autour de la notion plus concrète (mais toujours non-juridique) « dérive sectaire », la définissant de la manière suivante :
« La dérive sectaire est un dévoiement de la liberté de pensée, d’opinion ou de religion qui porte atteinte aux droits fondamentaux, à la sécurité ou à l’intégrité des personnes à l’ordre public, aux lois ou aux règlements. (…) Elle se caractérise par la mise en œuvre, par un groupe organisé ou par un individu isolé, quelle que soit sa nature ou son activité, de pressions ou de techniques ayant pour but de créer, de maintenant ou d’exploiter chez une personne un état de sujétion psychologique ou physique, la privant d’une partir de son libre arbitre, avec des conséquences dommageables pour cette personne, son entourage ou pour la société. »
La Miviludes qui reçoit près de 2500 signalements par an, utilise plusieurs critères d’identifications afin de les détecter :
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Déstabilisation mentale ;
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Caractère exorbitant des exigences financières ;
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Rupture avec l’environnement d’origine ;
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Existence d’atteinte à l’intégrité physique ;
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Embrigadement des enfants ;
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Discours antisocial ;
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Trouble à l’ordre public ;
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Éventuel détournement des circuits économiques traditionnels ;
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Tentatives d’infiltration des pouvoirs publics.
Il est important à savoir qu’un seul de ces critères ne suffit pas pour caractériser l’existence d’un risque de dérive sectaire, de plus, tous les critères n’ont pas la même valeur.
Le domaine de la santé et les dérives
La dérive thérapeutique devient sectaire dès lors elle essaie de faire adhérer le patient à une croyance, à un nouveau mode de pensée, lorsqu’elle s’accompagne « d’un mécanisme d’emprise mentale destiné à ôter toute capacité de discernement au malade et à l’amener à prendre des décisions qu’il n’aurait pas prises autrement ».
Il est important à savoir que la maladie est une « porte d’entrée » facile pour les individus ou les groupes à caractère sectaire qui profitent de la souffrance ou de l’inquiétude des malades et de leur famille afin de mieux installer l’emprise.
Quelques chiffres :
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4 Français sur 10 ont recours aux médecines dites alternatives, dont 60 % parmi les malades du cancer,
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Plus de 400 pratiques non-conventionnelles à visée thérapeutique,
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1 800 structures d’enseignement ou de formation « à risques » dans le domaine de la santé,
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4 000 « psychothérapeutes » autoproclamés n’ont suivi aucune formation et ne sont inscrits sur aucun registre.
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Plus de 800 kinésiologues, et environ 3 000 médecins seraient en lien avec la mouvance sectaire.
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Groupes New-Age
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Groupe « alternatifs »
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Groupes « évangéliques » et « pseudo-catholiques »
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Mouvements « apocalyptiques »
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Mouvements « néo-païens »
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Mouvements « sataniques »
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Mouvements « guérisseurs »
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Mouvements « orientalistes »
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Mouvements « occultistes »
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Mouvements « psychanalytiques »
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Mouvements « ufologiques »
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Mouvements « syncrétiques »
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Mouvements « islamistes violents » ou « salafistes djihadistes »
Les autres types de dérives sectaires
L’emprise mentale
Cette technique est destinée à ôter toute capacité de discernement à la personne et à l’amener à prendre des décisions qu’elle n’aurait pas prises autrement.
Le mécanisme d’emprise mentale en 3 étapes :
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Séduction
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Dépersonnalisation
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Reconstitution d’une nouvelle identité automatisée
Il existe alors deux phénomènes principaux :
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Soumission librement consentie : la conséquence d’un procédé de persuasion qui amène à donner l’impression aux individus concernés qu’ils sont les auteurs de certaines décisions.
But : Conduire la personne à prendre plus rapidement et plus facilement une décision qui peut ou non lui être bénéfique (mais surtout favorable à celui qui use de cette méthode).
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Soumission à l’autorité : évalue le degré d’obéissance d’un individu devant une autorité qu’il juge légitime, et analyse le processus de soumission à cette dernière, notamment quand elle induit des actions qui posent des problèmes de conscience au sujet.
But : Placer l’individu dans un état « agentique », dans lequel ce dernier perd son autonomie, délègue totalement sa responsabilité à l’autorité et se transforme en « agent exécutif d’une volonté étrangère ».
Des dangers importants
5 dangers pour l’individu :
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La déstabilisation mentale
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Des exigences financières exorbitantes
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La rupture de l’adepte avec son environnement
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L’atteinte à l’intégrité physique des adeptes
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L’embrigadement des enfants
5 dangers pour la collectivité :
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Un discours antisocial
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Des troubles à l’ordre public
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L’importance des démêlés judiciaires
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Le détournement des circuits économiques traditionnels
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Les infiltrations ou tentatives d’infiltration des pouvoirs publics
Infractions de droit commun :
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Atteintes aux biens : escroquerie, extorsion de fonds, abus de confiance, etc.
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Atteintes aux personnes : homicides, blessures involontaires, non-assistance à personne en danger, non-dénonciation de crimes, violences et menaces, proxénétisme, corruption de mineurs, agressions sexuelles, etc.
Qui peut solliciter l’intervention d’un enquêteur privé dans le cadre de dérives thérapeutiques ou sectaires ?
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Les proches de la victime, ou la victime elle-même une fois extirpée de l’emprise ;
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Un prescripteur (association ou avocat spécialisé) ;
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Le juge civil ou pénal dans le cadre d’une procédure en cours ou à venir.